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HISTOIRE

dans la majesté de sa force, la grande vérité que, dans ce siècle éclairé, l’homme est en état de se gouverner lui-même… »

Quand il fallut nommer des agents diplomatiques, l’embarras de M. de Lamartine ne fut pas moindre que ne l’avait été celui de M. Ledru-Rollin dans le choix des commissaires. Si la pratique du journalisme et du barreau n’était pas propre à former de bons administrateurs, elle préparait encore moins aux fonctions diplomatiques qui demandent, avec de grandes connaissances historiques et géographiques, le don de l’observation, la maturité et l’exactitude de l’esprit, la politesse des formes. Depuis longtemps, d’ailleurs, la diplomatie française était sensiblement déchue de sa supériorité passée. Les nobles traditions et les fières allures qu’elle avait conservées, à travers bien des vicissitudes, depuis le règne de Louis XIV avaient fait place, sous la triste inspiration du règne de Louis-Philippe, à un étroit et méticuleux esprit d’intrigue sans suite et sans fierté. Non-seulement la prépondérance de la France dans les affaires européennes était perdue, mais encore la dignité de son attitude semblait irréparablement compromise. À l’exception d’un très-petit nombre d’agents distingués, le corps diplomatique français, recruté dans les rangs de la noblesse impériale et de la bourgeoisie industrielle, n’avait montré que des talents médiocres. De tous les fonctionnaires de la monarchie, les envoyés diplomatiques étaient peut-être ceux auxquels il convenait le moins de confier les desseins de la République.

M. de Lamartine commença par rappeler tous les ambassadeurs et presque tous les ministres plénipotentiaires qui résidaient auprès des puissances étrangères. Il supprima, sauf pour des occasions extraordinaires, le titre d’ambassadeur et se borna, dans ce premier moment, à envoyer dans les cours européennes, avec des instructions confidentielles, quelques agents sans caractère officiel, qu’il chargea d’observer les dispositions des souverains et l’esprit des peuples.