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DE LA RÉVOLUTION DE 1848.

avait été beaucoup plus déterminé que ses collègues dans l’avis d’une résistance énergique, avaient été enlevés à temps par son secrétaire. Ceux du chef de cabinet du ministre des affaires étrangères, M. Génie, ne furent point visités. Dans la volumineuse correspondance de M. Guizot et du roi, on ne découvrit pas trace d’un plan sérieux d’attaque ou de défense. Il était bien évident que la pensée d’une guerre civile ne s’était pas présentée à l’esprit de ces deux grands personnages politiques. Une lettre de Louis-Philippe, en date du 22 février, témoignait au contraire d’une sécurité parfaite[1]. D’ailleurs, on put très-vite constater que le peuple, auquel on prêtait gratuitement des désirs de vengeance, ne donnait aucune attention aux ministres dont plusieurs étaient restés dans Paris sans se cacher beaucoup. Ni les clubs ni la presse ne songeaient à ce procès. On le ralentit de plus en plus sous un prétexte, puis sous un autre, et l’on gagna ainsi l’époque de la réunion de l’Assemblée constituante. Celle-ci nomma une commission chargée d’examiner trois portefeuilles trouvés dans les boiseries du château des Tuileries[2] et qui nécessitaient, assurait-on, un supplément d’instruction. Le rapport de cette commission se fit attendre, le temps s’écoula ; enfin, vers le mois de novembre, une ordonnance de non-lieu fut rendue par la chambre d’accusation sans que, à l’exception de quelques feuilles qui faisaient du bruit à propos de tout, personne en prît le moindre souci. La révolution, dans l’intervalle, avait de nouveau donné l’alerte ; la société, à peine reconstituée, se sentait menacée de trop d’autres périls et vulnérable sur trop d’autres points pour qu’elle eût à s’inquiéter en-

  1. Dans ses dernières lettres datées de février, le roi déclarait la situation excellente ; il s’en félicitait avec son ministre et ne lui recommandait autre chose que de bien soigner un mal de gorge dont il souffrait afin de pouvoir soutenir avec sa supériorité accoutumée le débat parlementaire.
  2. Ces portefeuilles contenaient, entre autres papiers, les Mémoires de Louis-Philippe.