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HISTOIRE

le mois de mai de l’année 1789, la commune de Paris avait ouvert à la butte Montmartre de vastes ateliers de terrassements. Trois mois plus tard, Malouet faisait à l’Assemblée une motion pour organiser ces ateliers et les acheminer vers les départements, selon les besoins de l’industrie. Un an après, le 30 mai 1790, l’Assemblée nationale rendait un décret qui ouvrait, dans Paris et dans les départements, des ateliers pour les hommes, pour les femmes et pour les enfants, « attendu, disait-elle, que la société doit à tous ses membres et la subsistance et du travail. » En 1791, les comités de mendicité, de constitution, d’imposition et le comité ecclésiastique, dans un rapport à l’Assemblée, proposaient de constituer un fonds de secours général, afin, disaient-ils, que la nation qui reconnaît le droit du pauvre, n’emploie plus le mot de charité ou d’aumône, et donne du travail aux valides, du secours aux enfants, aux malades, aux vieillards… » La Convention, en 1793, avait décrété que « la société devait la subsistance aux citoyens malheureux, soit en leur procurant du travail, soit en assurant les moyens d’exister à ceux qui se trouvaient hors d’état de travailler. » Enfin, sous le règne de Louis-Philippe, la plupart des économistes, aussi bien les catholiques et les philanthrophes que les socialistes, concluaient avec plus ou moins d’insistance à la nécessité de donner du travail à la classe laborieuse[1].

Il était donc de toute logique et de toute urgence que la République, qui venait reprendre et réunir, pour en faire la constitution de l’État, les idées de 89, étouffées sous l’Empire, reparues isolément dans quelques livres et dans quelques écoles sous les deux monarchies bourbonniennes, s’imposât de réaliser autant qu’il était en elle le vœu des cahiers et les promesses de la Convention. L’erreur du

  1. M. de Lamartine lui-même, qui fut toujours l’adversaire déclaré de la théorie de l’organisation du travail, disait, en 1844, dans le journal la Presse : « Nous voulons que la société reconnaisse le droit au travail dans les cas extrêmes et dans des conditions définies. »