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PRÉFACE

vère avec les années. Pourquoi donc en vouloir ou en permettre la réimpression ? Par un motif qui semblera bizarre à plusieurs : le devoir ; le devoir, tel qu’il m’apparaît pour chacun de nous, plus impérieux à mesure qu’il devient plus difficile, de solliciter, par tous les moyens et sans trop consulter ses forces, l’attention publique à l’examen des vérités contestées ; de protester, aussi haut qu’on le peut, contre l’indifférence en matière de politique et de dire résolûment ce que l’on croit juste, à ceux-là même qui font profession de n’estimer que ce qu’ils croient utile. C’est aussi parce que j’ai l’assurance, qu’aucun des récits publiés par les acteurs ou par les spectateurs de la révolution de 1848 n’a pu être écrit dans un ensemble de circonstances aussi propices à l’indépendance complète des vues et des jugements. Mais ceci demande explication.

Lorsque éclata la révolution de Février, mon attention, mes vœux étaient depuis longtemps tournés vers le progrès des idées démocratiques. L’intérêt que je prenais à la chose publique était vif, mais il n’avait rien de personnel. Quelle que dût être l’issue d’une révolution prochaine, je n’avais pas beaucoup à en craindre, je n’avais absolument rien à en attendre pour moi-même. Mon sexe, sous tous les régimes, m’interdisait les ambitions politiques ; la convoitise féminine du pouvoir pour mes amis ne m’était pas