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CHAPITRE XXV


La Révolution en Europe. — Pétersbourg. — Vienne. — Milan. — Berlin. — Expédition des corps-francs.


Si l’étonnement de la France démocratique fut grand lorsqu’elle apprit de Paris qu’elle n’avait plus de roi, que dut penser l’Europe monarchique et aristocratique en entendant tout à coup résonner à ses oreilles cette nouvelle incroyable : les Français viennent de chasser la dynastie d’Orléans ; ils ont choisi pour les gouverner un poëte lyrique, un avocat radical, un astronome et un prolétaire !

Aucune explication vraisemblable d’une telle énormité ne venait à l’esprit ni des souverains ni de leurs cours. Depuis bien des années déjà la diplomatie européenne considérait la force révolutionnaire comme très-affaiblie, sinon détruite, en France, par la longue application d’une politique savamment combinée. Les ambassadeurs des puissances étrangères, captivés par l’accueil et l’entretien aimables de Louis-Philippe, éblouis par les élégances de la société parisienne qu’ils voyaient dans une sécurité parfaite, avaient fini par réconcilier leurs maîtres avec la royauté illégitime. Les colères et les inquiétudes que l’usurpation de 1830 avait fait naître s’étaient peu à peu dissipées avec les préventions conçues contre le favori de la bourgeoisie libérale, devenu roi par la grâce du peuple. Comme la surprise exagère tout, quand on vit Louis-Philippe sacrifier sa popu-