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DE LA RÉVOLUTION DE 1848.

sonnes fortement prévenues, n’était pas défavorable. Blanqui, selon M. de Lamartine, était un caractère aigri, mais non pervers ; un esprit fourvoyé, mais capable de rentrer dans le vrai ; un cœur ulcéré, mais qui sous l’écorce impénétrable qu’il s’était faite, battait encore avec force ; Blanqui, enfin, et comme homme et comme citoyen, n’était pas indigne des enthousiasmes et des dévouements qu’il faisait naître.

Pendant que M. de Lamartine essayait par la séduction de son éloquence, par le charme de ses entretiens, auxquels il savait donner l’accent d’une intimité confidentielle, de dissoudre les éléments de conspirations, pendant qu’il concertait avec le général Négrier un plan de résistance dans les départements, en cas que Paris tombât aux mains des conjurés, les autres membres de la majorité du conseil ne demeuraient pas non plus inactifs.

Obligés, au lendemain de la manifestation du 17 mars, de feindre la satisfaction, de proclamer leur reconnaissance pour le peuple[1], de donner de nouveaux gages au parti radical par l’ajournement des élections générales et par la suppression de l’impôt sur les boissons, se voyant dans le conseil hors d’état de résister à la domination de M. Ledru-Rollin, ils sentirent la nécessité de se créer au dehors une force capable de lutter avec la force populaire.

M. Marrast entreprit avec beaucoup de suite et d’habileté de former à l’Hôtel de Ville un centre de résistance composé d’éléments tirés en partie de la bourgeoisie, en partie du peuple. Secondé par MM. Buchez, Recurt, Edmond Adam, de concert avec M. Marie, il pratiqua des intelligences dans la garde nationale, dans les ateliers nationaux, et s’assura le concours de la garde mobile par le général Duvivier, qui était en ce moment fort irrité contre M. Le-

  1. Voir, au Moniteur du 19 mars, la proclamation du gouvernement provisoire et l’ordre du jour du général Courtais à la garde nationale.