Aller au contenu

Page:Agoult - Histoire de la révolution de 1848, tome 2.djvu/229

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
225
DE LA RÉVOLUTION DE 1848.

nom de socialisme, qu’on lui donna après la révolution de Février, cette tendance voulait se frayer les mêmes voies légitimes par lesquelles la bourgeoisie est arrivée à l’émancipation : l’éducation qui donne la propriété intellectuelle ; le travail qui donne la propriété matérielle. Le socialisme demandait que l’État instituât l’éducation nationale égale pour tous ; il voulait rendre la condition du travail directement productif, qui est le travail du prolétaire, égale à celle du travail indirect de la spéculation capitaliste, qui est le travail de la bourgeoisie. Il voulait, en un mot, rendre la relation du capital et du travail, concourant ensemble à la richesse publique, plus équitable et telle qu’il n’en dût pas fatalement résulter cette hérédité de la misère, dont j’ai parlé, qui perpétue à l’état de classe le prolétariat, en l’excluant, sinon en droit, du moins en fait, de tous les bienfaits de la vie sociale.

Le mouvement du prolétariat socialiste n’était donc, au fond, que l’affirmation, la consécration nouvelle, par l’extension à tous, des principes et des droits de liberté et de propriété, sur lesquels repose la société européenne.

Mais cette tendance générale organisatrice était combattue par un mouvement accidentel, particulier, purement négatif qui, sous le nom de communisme matérialiste, niait complétement ce que le socialisme voulait étendre et transformer : le principe de la liberté individuelle, ou la personnalité, et la notion de propriété qui en est, dans les sociétés modernes, le signe et le gage.

Cette opération élémentaire de l’esprit humain qui consiste à opposer la négation à l’exagération d’un principe, se fait généralement dans les cerveaux étroits où naissent les passions aveugles. Il en arriva ainsi au communisme matérialiste. Plus aisément formulé que le socialisme, il adopta, comme mode de réalisation de son principe très-simple, le procédé également très-simple et très-logique du terrorisme et passionna un petit nombre d’hommes dont le fanatisme fut d’autant plus grand que leurs vues étaient