les Autrichiens, maîtres du château, bombardent la ville ; alors les émigrés polonais envoient des parlementaires au général autrichien, qui promet l’amnistie aux habitants, à la condition expresse que tous les émigrés rentrés quitteront sous trois jours le sol polonais.
Quelques-uns de ces rendus à la patrie, comme on les appelait, repartirent pour Paris, où ils arrivèrent dans les premiers jours de mai.
À l’aspect de leur, détresse, au récit de leurs souffrances, à la peinture des villes et des villages incendiés, saccagés, des campagnes dévastées, des populations passées au fil de l’épée, on s’émeut ; les murailles se couvrent d’appels à la fraternité des peuples ; sous le titre de Bulletin de Posen, un placard reproduit, dans les termes les plus véhéments, les griefs de l’émigration polonaise contre M. de Lamartine ; on parle de faire une manifestation et de porter processionnellement à l’Assemblée une pétition pour lui demander le rétablissement de la Pologne.
Ce fut là le point de départ, le but ostensible de cette fameuse journée du 15 mai, comparée par la presse du temps à l’insurrection de prairial, et dont les éléments, beaucoup plus mêlés encore que ceux des manifestations du 17 mars et du 16 avril, n’ont pas été jusqu’ici suffisamment connus. Il importe de nous en rendre compte. Bien que confuse à son origine, ridicule dans son issue, équivoque par les mains suspectes qui en tenaient les principaux fils, l’émeute du 15 mai a malheureusement exercé sur les destinées du pays une influence considérable. Elle a ébranlé les bonnes dispositions de l’Assemblée, en remuant sous ses yeux les bas fonds de la démagogie ; elle a fourni au parti de la contre-révolution un premier fait, mais énorme, à tourner contre le peuple. Elle va nous montrer enfin, et ce sont là des vérités utiles à méditer dans les sociétés démocratiques, comment, sous l’action de vils meneurs, se travestissent les sentiments populaires les plus honnêtes ; comment, dans les mouvements révolutionnaires, des personnages subal-