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HISTOIRE

tirent et reprennent le chemin de la préfecture de police. MM. de Lamartine et Ledru-Rollin, un moment séparés, se remettent en marche vers la place de Grève.

Voici cependant ce qui s’était passé.

Le maire de Paris avait été averti, le 14, par un agent de sa police particulière, qu’une manifestation, armée en partie, se porterait le lendemain sur l’Assemblée d’abord, puis, selon toute apparence, à l’Hôtel de Ville. Mais depuis le 24 février, ces sortes d’avertissements étaient si fréquents, et le plus souvent si mal fondés, qu’on avait fini par n’en plus tenir compte. M. Marrast, pensant, d’ailleurs, que si une manifestation avait lieu en effet, M. Barbès, M. Sobrier et d’autres qui lui étaient connus sauraient la contenir, ne s’en alarma pas et ne jugea pas à propos d’augmenter les forces dont il disposait.

Elles consistaient en une garnison de deux mille sept cents hommes, choisis avec soin, très-animés contre les Montagnards de Caussidière, et sur lesquels on croyait pouvoir compter absolument. Quelques compagnies de gardes mobiles étaient constamment de service à l’Hôtel de Ville. On avait huit cents fusils de réserve et des munitions en abondance. Le commandant de l’Hôtel de Ville, M. Rey, inspirait bien quelque défiance à cause de ses liaisons intimes avec des hommes exaltés ; mais M. Marrast croyait l’avoir gagné, en faisant régulariser et porter sur les cadres de l’armée son grade révolutionnaire de colonel.

On ne prit donc à l’Hôtel de Ville aucune mesure de sûreté particulière. Dans la matinée du 15, tout s’y passa aussi tranquillement que d’habitude. M. Marrast y arriva comme à l’ordinaire, entre une et deux heures, et s’installa dans son cabinet sans donner un seul ordre. Presque au même moment une foule considérable, sans armes, mais bannières déployées, s’avançait par le quai et débouchait sur la place qu’occupaient plusieurs détachements des 7e, 8e et 9e légions, commandées par le colonel Yautier. Quel-