Page:Agoult - Histoire de la révolution de 1848, tome 2.djvu/442

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
438
HISTOIRE

découragement dans leur esprit. Ils occupent encore, avec des forces considérables, les faubourgs Saint-Marcel, Saint-Antoine, Saint-Martin, du Temple, les boulevards extérieurs. Ils sont retranchés au clos Saint-Lazare comme dans une forteresse dont les ouvrages avancés touchent à l’église Saint-Vincent-de-Paul et à l’entrepôt de la Douane. Des secours continuels leur arrivent par les barrières de la Chapelle-Saint-Denis et de la Villette. La population de l’île Saint-Louis, restée neutre jusque-là sous la protection de la garde nationale, paraît s’agiter. Le caractère social de l’insurrection se prononce de plus en plus ; les agents des prétendants se dérobent et donnent à leurs hommes la consigne de ne plus crier que : Vive la République ! Le peu de drapeaux blancs qu’on a vus flotter le premier jour disparaissent ; les drapeaux rouges se multiplient. On distribue, on jette sur les barricades des exhortations au combat à outrance ; on répand le bruit que Lagrange marche sur Paris à la tête de trente mille ouvriers lyonnais. On affirme que Caussidière est maître de l’Hôtel de Ville ; son nom est dans toutes les bouches[1] ; on s’étonne de ne pas le voir. Il circule des listes pour un gouvernement provisoire où se lisent, étrangement rapprochés, les noms de Barbès, Raspail, Cabet, Pierre Leroux, Proudhon, Louis Blanc, Albert, Blanqui, Caussidière, Louis-Napoléon Bonaparte. Tout annonce que la résistance sera désespérée.

Cependant l’Assemblée, qui n’a fait autre chose pendant la journée du 24 qu’entendre des rapports sur les différentes phases du combat, ouvre, le 25, sa séance en votant un décret qui destine une somme de trois millions pour être répartie en secours à domicile, dans les quatorze arrondissements de Paris et de la banlieue, entre les familles nécessiteuses.

En même temps qu’elle rend ce décret, dans l’espoir de détromper enfin les prolétaires auxquels d’odieux excita-

  1. Les mots de ralliement au faubourg Saint-Antoine étaient : Caen et Caussidière ; Caussidière et République.