Page:Agoult - Histoire de la révolution de 1848, tome 2.djvu/51

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
47
DE LA RÉVOLUTION DE 1848.

de la commission qui est d’étudier toutes les questions relatives au travail, d’en préparer la solution dans un projet qui sera soumis à l’Assemblée nationale et, en attendant, d’entendre les requêtes urgentes pour faire droit à toutes celles qui seront reconnues justes. Quelques ouvriers montent à la tribune et déclarent que deux demandes sont l’objet d’une insistance particulière. Les ouvriers mettent pour condition à leur rentrée dans les ateliers la réduction des heures de travail et l’abolition du marchandage, c’est-à-dire de l’exploitation vexatoire des ouvriers par des sous-entrepreneurs de travaux qui, sans être d’aucune utilité réelle, absorbent une part considérable des bénéfices. Cette première réclamation, si modérée, si équitable qu’elle soit en principe, soulève des difficultés dont M. Louis Blanc sent sur le coup toute l’importance. Secondé par M. Arago qui, fidèle à sa promesse, venait lui prêter l’appui de son nom et de ses années, il essaye de gagner du moins un peu de temps en refusant de rien statuer avant que des élections régulières aient constitué une représentation complète des corporations. Il ajoute que l’avis des patrons, qui ne souffrent pas moins de la crise que les ouvriers et dont les intérêts sont au fond semblables, mérite aussi d’être entendu, si l’on ne veut risquer de compromettre, par une précipitation trop grande, le succès des mesures demandées.

Cette convocation des patrons a lieu le soir même. La plupart témoignent à l’égard des ouvriers les intentions les plus libérales et agréent les requêtes qui leur sont présentées. M. Louis Blanc, soulagé d’une inquiétude très-vive, fait rendre aussitôt par le gouvernement un décret qui abolit le marchandage et diminue d’une heure la durée de la journée de travail par toute la France, ce qui la fixe pour Paris à dix et pour les départements à onze heures. Mais la facilité qu’il rencontre dans ce premier essai de réforme est complétement illusoire. À peine rendu, le décret du 2 mars, qui n’est passible d’aucune sanction pénale[1], devient

  1. Le gouvernement essaya plus tard de lui en donner une. La peine