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Page:Agoult - Lettres républicaines.djvu/119

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plus fort d’un enthousiasme irréfléchi pour le nouveau pontife, heurter l’opinion publique et établir par une déduction sévère l’impuissance radicale de la papauté aussi bien à créer des institutions politiques en harmonie avec les besoins du temps qu’à procurer l’indépendance italienne. Vous avez montré la cause autrichienne et la cause papale inséparablement liées l’une à l’autre et leur intérêt identique, malgré les dissidences occasionnelles et les froideurs diplomatiques sur lesquelles des esprits d’ailleurs excellens fondaient des espérances dont l’évènement a fait, hélas ! prompte justice.

En effet, cet homme de bonne volonté qui n’a pas trouvé la paix, ce juste si digne d’un meilleur sort, nous l’avons vu se débattre avec une douloureuse énergie contre les inextricables lacs de la fatalité qui l’enserre sans en pouvoir rompre un seul. Ses cheveux ont blanchi, sa joue s’est creusée, son front s’est sillonné de rides, et plus d’une fois sans doute, dans ses veilles désolées, il s’est écrié avec son divin maître : « Mon père, mon père, pourquoi m’avez-vous abandonné ! »

C’est que la volonté d’un homme qui passe en quelques jours ne peut rien contre la logique immuable d’une institution séculaire ; c’est que la papauté est plus forte que les papes, et qu’elle les brisera tous plutôt que de s’assouplir au gré de leurs vœux. Quand donc l’Italie le comprendra-t-elle ? Ce sont les principes et non les passions qui gouvernent le monde.

Et ici, je touche avec vous au principal obstacle qu’a rencontré dans le passé le succès de la cause italienne. Il est, non dans les circonstances extérieures, mais dans le caractère, dans les habitudes traditionnelles d’un peuple enthousiaste et sensible, qui, sous une inspiration exclusivement catholique, s’abandonne sans contrôle aux élans d’un tempérament impétueux qui ne tient guère compte des conjonctures, n’examine pas les moyens, n’apprécie point les hommes auxquels il livre plutôt qu’il ne confie ses destinées.

C’est encore chez vous une exception trop rare qu’une opinion rationnelle et une conviction fortement enracinée. Vous portez encore au forum plus de ferveur que de juge-