Page:Agoult - Lettres républicaines.djvu/131

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dans ses rangs, se divisera. Dans des camps séparés, elle servira des ambitions militaires qu’il n’est pas difficile d’entrevoir déjà, ou refusera, le cas échéant, de marcher contre les anarchistes. La Bourse, épouvantée à la seule annonce de l’élection de M. Bonaparte, nous présage ce que deviendront nos finances sous cette restauration impériale qui nous ramène sous les inconvéniens des restaurations : les dévoûmens à récompenser, les idées d’un autre temps, la morgue d’une camarilla, d’une émigration ridicule où l’on se traitait entre soi d’Altesse et de Majesté, et qui sait ? un protectorat étranger, peut-être ?

Électeurs, songez-y devant Dieu. Il y va de l’honneur de la France.

« Puisse le ciel, s’écriait dans un temps analogue au nôtre, une femme de génie[1], ne pas permettre qu’une si belle révolution n’ait été faite que pour quelques factieux au détriment du bon Peuple qui n’avait besoin que de soutien pour se perfectionner ! »

Peuple électeur, méditons ces graves paroles ; rentrons en nous-mêmes ; recueillons nos pensées ; élevons nos cœurs au dessus de nos préférences et de nos antipathies personnelles, au dessus de l’esprit de parti, au-dessus de toutes les considérations légitimes mais subalternes. Faisons taire un moment nos passions ; ne prenons conseil que de la raison et de l’honneur. N’oublions pas que nous allons écrire une page ineffaçable de notre histoire. Songeons que nous avons le monde pour témoin et la postérité pour juge.

Sursum corda !

  1. Madame Roland.