Page:Agoult - Lettres républicaines.djvu/47

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En dehors de l’utopie et de la secte, quelques hommes isolés cherchent dans la solution des problèmes économiques une meilleure organisation de la société.

Parmi ceux-là, M. Louis Blanc a trouvé un instant crédit dans l’esprit des travailleurs éblouis par un certain éclat de rhétorique et par une verve peu commune. Le système de M. Louis Blanc est fort simple au premier abord. Il s’agit, sans plus, de supprimer la liberté individuelle avec l’industrie privée et de remettre aux mains de l’État l’industrie collective, organisée en ateliers nationaux administrés par une assemblée délibérante selon le principe de l’égalité des salaires. La transformation de la propriété individuelle en propreté collective est une conséquence nécessaire de ce système.

En vain une expérience tentée dans les circonstances les plus favorables est-elle venue donner un démenti flagrant aux promesses et aux assertions de M. Louis Blanc. En vain de savantes critiques ont-elles défait pièce à pièce son échafaudage de paradoxes. M. Louis Blanc répond à ses adversaires que l’individualisme ne saurait comprendre la fraternité et que le dévoûment opère des miracles ; comme si le dévoûment, cette magnificence de l’âme, pouvait jamais devenir l’état permanent d’un peuple et se commander de par la loi ! Mais l’auteur de l’Organisation du travail ne s’embarrasse point pour si peu. Il ne s’inquiète guère ni de ses contradicteurs, ni de ses contradictions. Cet éclectique du communisme professe, avec les éclectiques de la doctrine, une confiance inébranlable en ses lumières propres, fortifiée d’un dédain superbe pour celles d’autrui. « Placé sur les confins du socialisme et de la démocratie, a dit de lui un écrivain qui combat pour la même cause, un degré plus bas que la République, deux degrés au-dessous de M. Barrot, trois au dessous de M. Thiers, M. Louis Blanc est encore lui-même, quoi qu’il dise et quoi