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Page:Agoult - Lettres républicaines.djvu/49

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matérielles d’existence incompatibles avec la liberté véritable.

Ils sont convaincus que les droits politiques accordés à tous les citoyens par l’institution républicaine ne sont point le but définitif de la Révolution de Février, mais le moyen par lequel la Démocratie arrivera à conjurer pacifiquement le plus implacable des despotismes, le despotisme de la misère. Le socialisme des hommes d’État ne voit point dans la propriété un obstacle à ce progrès, tout au contraire. Il puise dans l’histoire, dans la philosophie, dans la science, la certitude que la propriété est une forme essentielle de la personnalité, et conséquemment, à mesure qu’un plus grand nombre y participe, qu’elle marque un développement ascendant de la civilisation. Mais il la croit très menacée par l’impatience toujours croissante de ceux qui ne possèdent pas, et, pour la sauver, il voudrait la rendre de plus en plus accessible.

Pour atteindre ce but, les socialistes sérieux cherchent les moyens d’organiser le crédit de telle sorte que le travail et la production soient exonérés des charges qui les rendent stériles et dérisoires pour le travailleur, afin que celui-ci puisse à son tour se reposer, posséder, jouir des fruits de son labeur et de son industrie. L’homme pauvre travaille aujourd’hui avec la certitude presque absolue du contraire. Il sait qu’à moins de circonstances extraordinairement favorables, il n’arrivera jamais au bien-être, au loisir. Le socialisme des hommes d’Etat est persuadé que la société peut changer ces conditions accablantes de la vie du prolétaire.

Sans partager les illusions des utopistes, illusions d’un orgueil sans bornes, il écoute leurs plus creuses divagations, comme vous l’avez su faire tout récemment, avec une patience bienveillante afin de recueillir la moindre parcelle de vérité où elle se rencontre.

Sans emprunter le jargon mystique des sectaires, tout en frappant de réprobation leurs haines et leurs menaces, il épie jusqu’à leurs plus folles extravagances, pensent, avec le