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nante, un énigmatique sourire dont l’atroce ironie poursuivait le mari jusqu’en sa ruelle, le pénétrait jusqu’en ses moëlles d’une innumérabilité de pointes de feu… Dans ces conditions, autant eût valu au malade cracher sur sa jambe mauvaise, en priant le Bon Dieu pour qu’il gelât dessus. Un beau matin, la fièvre s’en mêla, le délire, tout le diable et son train ; l’oncle commença à discourir à la façon d’une femme soûle, disant que sa femme s’amusait à le faire cuire à petit feu après l’avoir lardé tout vif, qu’elle avait suspendu des lampions allumés aux quatre coins de sa table de nuit, et qu’en signe de réjouissance, elle tirait des feux d’artifice à travers l’appartement : des bêtises, enfin, des giries, tout un 14 juillet en chambre, éclos en un cerveau malade de Prud'homme déshonoré »… « Tenez-vous sur vos gardes à ce moment » dit Dupuytren. En effet, ça ne tarda pas. « Ayant ainsi, trente-six heures, donné la comédie aux gens, le moribond tourna de l’œil. »

Ce délire présente bien les symptômes fondamentaux de la description que nous avons donnée : obtusion de l’esprit, délire onirique et agitation physique. Nous avons dit que ce délire se rapprochait du délire alcoolique, et Courteline, dans une phrase, fait Ce rapprochement : « Il commença à discourir à la façon d’une femme soûle. »


III. Troubles mentaux dans les névroses.


Les névroses offrent souvent des symptômes de troubles mentaux qui les rapprochent des maladies mentales. La neurasthénie est de cet ordre et nous puisons dans l’œuvre de Courteline, deux observations de neurasthéniques : Alceste et M. Badin.

Le premier[1] est l’Alceste de Molière, que l’auteur nous mon-

  1. G. Courteline : La Conversion d’Alceste comédie en un acte en vers.