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L’ILLUSTRE MAURIN

temps il pourra respirer, pas moins ! Pas longtemps, bien sûr, parce que c’est, je dis, sa nature d’attirer les procès-barbaux, comme on dit que les cyprès attirent les éclairs et le tonnerre.

« Que voulez-vous attendre d’un homme qui ne veut que la vraie justice en ce monde ? Celui-là — je me le comprends — est un homme qui aura toujours contre lui les imbéciles ; et les imbéciles sont une armée, je vous dis, tout le monde en est !

« Que voulez-vous attendre d’un homme qui force un Caboufigue à lui signer un papier par lequel ce richard s’engage à ne pas essayer seulement d’être député ! C’est se mettre contre lui un citoyen plus puissant que le bon Dieu en ce monde, car l’argent, mes amis, l’argent est le roi de toutes les républiques.

« Et le jour où Verdoulet a tué Grondard (car c’est Verdoulet, je le sais ; sa femme, qui est une bavarde, a fini par conter toute l’affaire), le jour où Verdoulet a tué Grondard, pourquoi Maurin, — qui l’a vu, — lui a-t-il dit : « Je ne te vendrai jamais ! » Il aurait dû lui dire : « Je ne te vendrai pas, à moins qu’on m’accuse moi. » Mais non, il a promis de ne rien dire ; et comme il a promis il tiendra ; qué couyoun !

« C’est pourtant cela, jusqu’ici, qui est la plus mauvaise accusation de toutes celles que je connais contre lui, vu qu’il s’agit de la vie d’une manière d’homme, quoique Grondard fût un diable ; mais il avait une figure comme vous et moi, — ce qui n’était pas juste !

« Et pourquoi, je vous le demande, Maurin se laisse-t-il accuser, puisqu’il connaît qui a fait le coup ? Ce Grondard était un criminel, que le peuple d’ici appelait la Besti ; on l’appelait aussi l’Ogre, pourquoi il donnait