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L’ILLUSTRE MAURIN

— Tout de frais elle est vernie, cette voiture, dit Lacroustade ; vernie elle est tout de frais. Que pour un miroir, véritablement, on prendrait chacune de ses portes ; que véritablement chacune de ses portes, pour un miroir on la prendrait… coin ! coin ! coin !

Et toute la compagnie, oubliant déjà l’apostrophe de Cigalous à M. Labarterie, — s’esclaffa en entendant et en imitant malgré elle le rire nasal de Lacroustade…

Sur la place, çà et là, — c’était un dimanche, — des groupes qui jouaient aux boules quittèrent le jeu pour assister à l’arrivée d’une si belle voiture. Les fillettes pavoisées, selon le mot de Maurin, se promenaient, se donnant le bras ; sous les mimosas et les faux poivriers. Elles s’accoudèrent à la balustrade de la promenade qui surplombe la première terrasse et regardèrent aussi.

Il n’était pas loin de midi.

— C’est Caboufigue le fils, dit Maurin.

— V’aviès pas dit qu’èr’ùn darnagas ? tu ne l’avais pas dit que c’était un darnagas ? dit Mascurel.

— Un darnagas, tu l’avais dit, que c’en était un, insista Lacroustade en riant : coin ! coin ! coin !

À l’angle de la place et de l’hôtel d’Halbran, le landau s’arrêta. Caboufigue le fils, baron de la Canestelle, haut sur col, le col blanc au-dessus d’une chemise de couleur, la cravate provocante, la canne en bois des îles à la main, sauta à bas de sa voiture à peine arrêtée et se dirigea vers le groupe où il reconnaissait Maurin.

— Mille excuses, messieurs, dit-il, avec son bel accent de Paris, un accent tout neuf, qui lui servait rarement, — vous savez peut-être ce qui m’amène ?

Ces messieurs s’inclinèrent, faisant signe que non.