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L’ILLUSTRE MAURIN

« — Où est l’évêque ? lui dit-on.

« — L’évêque ! Quel évêque ? »

« Il me fallut expliquer la chose. Le commandant voulut en rire. Mais le curé ne riait pas, d’avoir fait sortir, pour des matelots, son saint de bois, et la croix et la bannière. Et, voilà comment j’ai fait, moi, Maurin, avant même le jour d’aujourd’hui, sonner les cloches, et battre les tambours, et se pavoiser une ville, le maire et les adjoints compris. Je n’en suis pas plus fier pour ça… A tu, Marlusso !

— Vous nous avez habitués, monsieur Maurin, à entendre des histoires plus piquantes, dit M. Labarterie…

— Je vous comprends votre genre, à vous ! riposta vivement Maurin, il vous en faut toujours de drôles. Celle que je viens de dire n’est jolie, selon mon idée, que parce qu’on voit avancer ce bateau comme une île de fleurs au-devant de cette ville qui se pavoise et se fleurit de son côté pour lui répondre : si vous ne voyez pas ça comme si vous y étiez, alors vous êtes perdu pour l’intelligence de mon histoire… Pardine ! il faut voir le tableau, tout est là…

— Maurin est un artiste, dit M. Rinal.

— Nous sommes un peuple comme ça, dit Maurin.

Et se tournant vers M. Labarterie :

— Je vois qu’à vous il vous faudrait tout le temps rien que des histoires comme celle du capitaine Cougourdan du port des Martigues. En pleine mer, il regardait sa carte, celui-là, et ayant reconnu l’endroit où se trouvait son bateau, qui filait bon vent vers le côté de son papier où il n’y avait plus que la marge sans dessin ni écriture : « Vire de bord, n. d. D. ! et la barre toute !… ou nous se foutons en bas de la carte ! »