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perdu, et le règne d’Auguste ne fut probablement jamais achevé. De tant de belles pages consacrées à la vertu, il ne nous reste que la vie d’Agricola et le portrait de Trajan ; encore ce dernier morceau nous est-il parvenu tout mutilé, comme ces statues antiques dont nous ne possédons que des débris, mais des débris sublimes où respirent le génie de l’artiste et l’âme d’un Dieu !

Les écrits de Tacite ont un caractère particulier, on y sent une âme méditative et solitaire qui se repose en elle-même. Témoin d’une corruption inouïe, il la juge sans colère, partagé entre la tristesse qui naît du spectacle de tant de vices et la sérénité que lui inspire sa confiance dans la justice des dieux. Ce double sentiment est empreint dans toutes ses pages ; il lui doit cette raison calme et réfléchie qui domine les événements, et ce courage inflexible qui juge les tyrans en leur présence. C’est le secret de ce beau génie ! Sa philosophie est toute religieuse ; et sans doute il fallait une philosophie sur-humaine pour peindre des monstres tels que Tibère, Caligula, Claude, Né-