— On vous guette ! prenez garde ! interrompit l’Indienne pour terminer cette conversation qui les embarrassait tous deux : ils vous guettent ! ils vous poursuivront partout dans les bois.
— Peuh ! laissez-les donc faire ! répartit Basil qui retrouvait toute son énergie et sa fierté sur ce terrain là ; laissez-les faire ! je n’ai pas peur. J’ai été poursuivi, j’ai combattu toute ma vie ; personne n’est arrivé à m’atteindre. Il faut bien des Français et bien des Indiens pour me vaincre ; il en faut trop !
— Vous êtes un bon guerrier, fameux dans les combats : observa la jeune fille en levant sur lui ses grands yeux noirs empreints d’une admiration naïve.
La face bronzée du Forestier rougit d’aise à ce compliment : il resta quelques secondes sans savoir que dire.
— Voilà trente ans que je cours les bois : j’aurais été un grand sot de ne pas apprendre quelque petite chose en cette matière : répliqua-t-il avec une modestie d’enfant.
Tout à coup le souvenir de Johnson lui traversa l’esprit comme une flèche aiguë.