Page:Aimard - Curumilla, 1860.djvu/344

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commanda le feu en balbutiant, et les soldats, tirant les uns après les autres, n’atteignirent pas le patient.

— Finissons-en, caraï ! s’écria le général.

Les soldats rechargèrent leurs fusils ; le commandement de feu se fit entendre de nouveau.

Une décharge éclata comme un coup de tonnerre, et le comte retomba la face contre terre.

Il était mort : le progrès, l’idée, comptaient un martyr de plus.

— Mon père, adieu ! cria une voix aux oreilles du général, je tiens ma promesse.

Don Sébastian se retourna avec effroi : il avait reconnu la voix de sa fille.

Doña Angola venait de rouler sur la grève.

Son père se précipita vers elle. Il était trop tard, il ne serra dans ses bras qu’un cadavre.

Sa punition commençait déjà. À peine le comte fut-il tombé, que Valentin s’élança vers lui, suivi du missionnaire.

— Que nul n’approche de ce corps ! dit-il d’une voix qui fit reculer les plus braves ; et, s’agenouillant à sa droite, tandis que le missionnaire se plaçait à sa gauche, il pria.

Curumilla avait disparu.

À ceux qui me diront que le comte de Prébois-Crancé était un aventurier, je demanderai ce qu’était Hernando Cortez la veille de la prise de Mexico ?

En politique comme en toutes choses, c’est la fin qui justifie les moyens, et le succès n’est que la consécration du génie[1].

FIN.
  1. Voir la note A, page 334.