Page:Aimard - Curumilla, 1860.djvu/78

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seulement gisaient les troncs des arbres abattus pendant la journée afin d’agrandir l’horizon et dégager les alentours du camp.

— Non, dirent-ils enfin, nous ne voyons rien.

— Les yeux des blancs se ferment la nuit, murmura sentencieusement le chef.

— Mais où sont-ils ? reprit le comte avec impatience ; pourquoi ne pas nous avoir avertis ?

— Mon frère Koutonepi m’envoie pour cela.

Le nom de Koutonepi, c’est-à-dire le vaillant, avait été donné à Valentin par les Araucans à son arrivée en Amérique, et jamais Curumilla ne le nommait autrement.

— Alors, hâtez-vous de nous instruire, chef, afin que nous puissions déjouer la ruse maudite que sans doute ces démons ont inventée.

— Que mon frère avertisse ses guerriers d’être prêts à combattre.

La recommandation passa immédiatement de l’un à l’autre sur toute la ligne.

Curumilla épaula alors tranquillement son rifle, visa pendant quelques secondes un tronc d’arbre assez rapproché des retranchements et fit feu.

Jamais coup de feu ne produisit un effet semblable. Un cri horrible s’éleva de la plaine et une foule de Peaux-Rouges se dressant, comme mus par un ressort, de derrière les troncs d’arbre qui les abritaient, s’élancèrent sur les retranchements, en bondissant comme des coyotes, en poussant des hurlements affreux et en brandissant leurs armes avec rage.

Mais les Français étaient préparés à cette attaque ; ils reçurent les Indiens sur leurs baïonnettes sans