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L’ÉCLAIREUR.

qui vous restent, et lorsque le moment sera arrivé, tâchez de prouver votre innocence en confondant votre accusateur, chose que je vous souhaite ardemment.

Don Stefano laissa tomber sa tête dans ses mains avec une expression de désespoir.

— Mais comment voulez-vous que je prépare ma défense, puisque j’ignore quels sont les faits que l’on m’impute ? Éclairez-moi dans ces ténèbres, faites luire à mes yeux une lueur, si faible qu’elle soit, afin que je puisse me guider, savoir où je vais enfin.

— En parlant ainsi que je l’ai fait, caballero, j’ai obéi à ma conscience qui m’ordonnait de vous avertir du danger qui vous menace ; vous en dire davantage me serait impossible, puisque, ainsi que vous, j’ignore tout complètement.

— Oh ! c’est à en devenir fou ! s’écria don Stefano.

Sur un geste de Bon-Affût, Ruperto et l’Aigle-Volant se levèrent ; le chasseur fit signe à l’Églantine de les imiter ; tous quatre se retirèrent et don Stefano demeura seul.

Le Mexicain se laissa aller sur le sol avec cette fureur insensée de l’homme fort devant lequel se dresse tout à coup un obstacle infranchissable, et qui, acculé dans une position désespérée, est contraint de s’avouer vaincu. En proie à la plus profonde anxiété, ne sachant de quel côté se tourner pour conjurer la tempête qui grondait sur sa tête, il cherchait vainement dans son esprit les moyens d’échapper aux mains qui le tenaient. Son génie inventif, si fécond en ruses de toutes sortes, ne lui fournissait aucun faux-fuyant, aucun stratagème qui put l’aider à soutenir avantageusement cette lutte suprême contre l’inconnu ; en vain il se creusait la tête, il ne trouvait rien.

Tout à coup il se releva, et par un mouvement prompt comme la pensée, il porta la main à sa poitrine.

— Ah ! s’écria-t-il avec découragement en laissant re-