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L’ÉCLAIREUR.

courir seuls la responsabilité de cet acte ; réfléchissez donc sérieusement avant de répondre aux questions que je vous adresserai, et surtout souvenez-vous que de vos réponses dépendent la vie ou la mort de ce malheureux : caballeros, dans votre âme et conscience, cet homme est-il coupable ?

Il y eut un instant de silence suprême ; tous les visages étaient graves, tous les cœurs battaient avec force.

Don Estevan les sourcils froncés, le front pale, les bras Croisés sur la poitrine, mais la contenance ferme, car il état brave, attendait en proie à une anxiété que par la seule force de sa volonté, il parvenait à renfermer en lui-même.

Bon-Affût, après avoir attendu quelques minutes, reprit d’une voix lente et solennelle :

Caballeros, cet homme est-il coupable ?

— Oui, s’écrièrent les assistants d’une seule voix.

Cependant don Mariano, grâce aux soins de ses domestiques, commençait à donner quelques signes de vie, précurseurs de son retour à la connaissance.

Balle-Franche se pencha à l’oreille de Bon-Affût.

— Est-il convenable, lui dit-il à voix basse, que don Mariano assiste à la condamnation de son frère ?

— Non certes, répondit vivement le vieux chasseur ; d’autant plus que maintenant que le premier moment de colère est passé, il est probable qu’il intercéderait en sa faveur ; mais comment faire pour l’éloigner ?

— Je m’en charge, je vais le conduire au camp des gambucinos.

— Hâtez-vous.

Balle-Franche se leva et s’approcha de Bermudez avec lequel il échangea quelques mots oreille à oreille ; puis les deux domestiques, prenant leur maître dans leurs bras, disparurent avec lui dans les taillis, suivis par le chasseur et par l’Églantine, à laquelle le Canadien avait fait signe de