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L’ÉCLAIREUR.

quatre minutes qui durèrent un siècle pour le Mexicain ; enfin, il reprit d’une voix perfidement doucereuse :

— Je sais où sont les deux jeunes filles pales que mon frère cherche vainement.

Don Estevan, à cette parole, bondit comme s’il avait été soudainement piqué par un serpent.

— Vous le savez ! s’écria-t-il en lui serrant le bras avec force et en le regardant fixement.

— Je le sais, répondit Addick, toujours impassible.

— Ce n’est pas possible.

L’Indien sourit avec mépris.

— C’est sous ma garde, dit-il, guidées par moi, qu’elles ont été conduites où elles se trouvent maintenant.

— Et vous pouvez m’y conduire ?

— Je le puis.

— À l’instant ?

— Oui, si vous acceptez mes conditions.

— C’est vrai, dites-les donc.

— Que préfère mon frère : ces jeunes filles ou la vengeance ?

— La vengeance !

— Bon, les jeunes filles pâles demeureront où elles sont ; Addick et le Loup-Rouge sont seuls, leurs callis sont solitaires, ils ont besoin chacun d’une femme ; les guerriers chassent ; les ciuatl préparent la nourriture et soignent les papous. Mon frère me comprend-il ?

Ces paroles furent prononcées avec une si étrange accentuation que, malgré lui, le Mexicain frissonna ; mais se remettant presque aussitôt :

— Et si j’accepte ? dit-il.

— Le Loup-Rouge a deux cents guerriers : ils sont à la disposition de mon frère pour l’aider à accomplir sa vengeance.

Don Estevan laissa tomber sa tête dans ses mains : pen-