Aller au contenu

Page:Aimard - La Fièvre d’or, 1860.djvu/207

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
200
LA FIÈVRE D’OR.

Cependant, à l’époque dont nous voulons parler, la première fureur de la course aux placeres était un peu calmée ; grâce à l’impulsion donnée par quelques hommes résolus, doués d’une haute intelligence et de cœurs généreux, la vie normale commençait peu à peu à s’organiser ; déjà les bandits ne tenaient plus aussi audacieusement le haut du pavé, les honnêtes gens pouvaient enfin respirer et relever la tête ; tout faisait présager des jours meilleurs ; on était enfin arrivé à l’aurore d’une ère d’ordre, de paix et de tranquillité.

Deux mois environ après les événements que nous avons rapportés dans notre précédent chapitre, nous conduirons le lecteur dans une charmante maison construite un peu à l’écart, comme si ses habitants eussent cherché à s’isoler le plus possible du tourbillon dans lequel ils étaient contraints de vivre, et nous introduisant dans une salle basse modestement meublée de quelques chaises communes et d’une table sur laquelle était étendue une carte détaillée du Mexique, nous assisterons à la conversation de deux hommes, penchés tous deux sur cette carte.

De ces deux hommes, l’un nous est connu déjà, car il n’était autre que le comte Louis de Prébois-Crancé. Son interlocuteur était un homme entre deux âges, à la figure fine et intelligente, dont l’œil respirait l’audace et la franchise ; ses manières étaient distinguées. Il semblait être Français, du moins c’était dans cette langue qu’il parlait, sans le plus léger accent, et qu’il s’entretenait avec le comte.

Au moment où nous les mettons en scène, nos deux personnages pointaient avec des épingles à tête noire diverses régions de la carte étalée devant eux.