Page:Aimard - La Fièvre d’or, 1860.djvu/27

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
20
LA FIÈVRE D’OR.

ose me menacer de la justice ! En joue, vous autres, et feu sur le premier qui bouge !

Les domestiques obéirent.

Don Sébastian saisit alors l’hôtelier malgré ses cris et sa résistance désespérée, et en un tour de main il l’eut renversé à terre.

— Je crois rendre service à tous les voyageurs que leur mauvaise étoile amènera désormais dans ce bouge, continuait-il, en châtiant ce drôle comme il le mérite.

Les témoins de cette scène, peones, arrieros ou voyageurs n’avaient pas fait un mouvement pour venir au secours de l’hôtelier. Il était évident que tous, pour certaines raisons, étaient intérieurement satisfaits de ce qui lui arrivait.

Nul d’entre eux n’aurait osé prendre sur lui la responsabilité d’un tel acte ; mais puisqu’il se trouvait une personne qui consentait à l’assumer, ils se gardaient bien d’apporter le moindre obstacle à ce qu’il voulait faire.

Sur l’ordre péremptoire du colonel, le pauvre diable d’hôtelier fut attaché par deux de ses propres domestiques à la longue perche de la noria, et mis dans l’impossibilité de faire un mouvement.

— Maintenant, continua le colonel, prenez chacun une reata (corde) et frappez à tour de bras sur ses reins jusqu’à ce qu’il s’avoue vaincu et consente à ce que j’exige de lui.

Malgré leur feinte répugnance, force fut aux deux peones de l’hôtelier d’obéir à l’injonction du colonel, injonction soutenue par quatre carabines et deux pistolets, dont les gueules menaçantes étaient dirigées sur eux à bout portant.