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LA FIÈVRE D’OR.

une tante qui, en mourant, m’a fait son héritier ; j’emporte avec moi en ceinture cent cinquante onces d’or[1], et dans mon portefeuille des traites pour égale somme payables à San-Blas. Vous voyez que je ne suis pas aussi pauvre que j’en ai l’air ! Mais, la route est longue et périlleuse de Guadalajara à San-Blas, et j’ai pris ce déguisement afin d’échapper aux voleurs, si cela est possible.

— Fort bien, don Cornelio ; vous pouvez maintenant, si cela vous plaît, changer de costume, car j’espère que nous ferons route ensemble.

— De grand cœur ; mais, si cela vous est égal, je conserverai provisoirement mon costume de lepero.

— Comme vous voudrez ; maintenant allons au fait : qu’avez-vous à m’apprendre ?

— Pas grand’chose, mais cependant assez pour nous mettre sur nos gardes. Notre hôte, après avoir fait sa ronde et s’être assuré que chacun était retiré, a réveillé un de ses domestiques, tenez, justement celui qui frappait de si bon cœur.

— Oui, je me rappelle la figure de ce coquin.

— Fort bien ! Après l’avoir fait entrer dans sa chambre, il est resté enfermé dix minutes avec lui, puis il a ouvert une fenêtre, le peon a sauté sur la route et est parti de toute la vitesse de ses jambes.

— Oh ! oh ! fit le colonel.

— L’hôtelier l’a suivi des yeux jusqu’à ce qu’il eût disparu, puis il a marmoté quelques mots que je ne pus comprendre, excepté un nom qui est arrivé, grâce à Dieu, jusqu’à moi.

  1. À peu près 12 750 fr. de notre monnaie.