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LA FIÈVRE D’OR.

cette visite. L’orejada, ajouta-t-il en se tournant vers les deux bandits qui étaient demeurés près de l’hôtelier.

— Un instant, fit le capitaine.

Saccaplata croyant en être quitte pour la peur, grimaça un sourire.

— Je vais te dire, moi, reprit le capitaine, pourquoi tu es venu ; tu veux te venger du colonel Guerrero, qui, il y a quelques heures, t’a infligé une correction méritée,

— Mais, hasarda l’hôtelier…

— Silence ! n’essaie pas de nier, j’étais là, j’ai vu ce qui s’est passé ; comme tu es trop lâche pour oser te venger toi-même, tu as pensé à nous, supposant que nous ne refuserions pas de te rendre ce petit service. Qu’en dis-tu, est-ce vrai ?

— Hum ! je ne me permettrai pas de démentir Votre Excellence, répondit l’hôtelier, qui commençait à regretter de s’être fourré dans ce guêpier.

Les bandits, attirés par le colloque, s’étaient peu à peu rapprochés et formaient le cercle autour des interlocuteurs en riant sournoisement entre eux. Cependant, bien qu’accoutumés aux bénignes excentricités de leur digne chef, ils étaient loin de s’attendre au dénouement de cette scène.

Après avoir prouvé clair comme le jour à Saccaplata qu’il n’était pas dupe du motif qui l’avait poussé à venir offrir ses bons offices aux salteadores, le capitaine continua en ces termes, en souriant d’un air narquois :

— Cher huesped de mon cœur, nous ne refusons pas de nous charger de ta vengeance, d’autant plus