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LA FIÈVRE D’OR.

ou du moins pour des hommes domiciliés dans cet État.

L’hôtelier, voyant que les nouveaux-venus ne semblaient nullement s’occuper de lui, se décida enfin à faire quelques pas vers eux et à leur adresser la parole.

— Que demandez-vous ? leur dit-il.

— Rien, quant à présent, répondit le plus âgé, mais dès que nos chevaux auront fini de boire, vous leur donnerez à chacun une mesure de maïs et une botte d’alfalfa.

— Je suis le mesonero et non un peon ; ce n’est pas à moi de vous servir, fit-il brutalement.

Le voyageur qui avait parlé regarda l’hôtelier de travers.

— Que ce soit par vous ou par vos criados, peu m’importe, répondit-il sèchement ; pourvu que l’ordre que je vous donne soit exécuté promptement, parce que je suis pressé.

Devant cette rebuffade, et surtout à cause du coup d’œil qui l’avait accompagnée, le huesped jugea prudent de rentrer ses cornes et de prendre un ton plus conciliant.

Depuis quelques heures, le pauvre Saccaplata n’était pas heureux avec ses voyageurs ; tous ceux que le ciel lui envoyait avaient l’air de novillos (jeunes taureaux) échappés du toril.

— Vos excellences sont sans doute pressées de se remettre en route ? dit-il d’une voix insinuante.

Les étrangers ne répondirent pas.

— Sans être trop curieux, reprit l’hôtelier qui ne se décourageait pas, puis-je savoir quelle direction comptent prendre vos honorables seigneuries ?