Page:Aimard - La Grande flibuste, 1862.djvu/129

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de Torrès et sa fille ont quitté Guaymas pour se rendre au Rancho de San José.

— Ma foi, tu as raison, j’avais oublié tous ces détails-là, moi ; je ne songeais plus aux oiseaux de proie de toute sorte qui nous guettent au passage. Eh bien, au bout du compte, qu’est-ce que cela nous fait que des bandits se mettent à nos trousses ; nous ne nous cachons pas, notre départ a eu lieu devant assez de personnes pour que nul ne l’ignore ; nous sommes assez nombreux pour ne redouter aucune insulte ; mais si quelques-uns de ces picaros osent nous attaquer, cascaras ! ils trouveront à qui parler, j’en suis convaincu. Poussons donc en avant, sans soucis, Blas, mon garçon ; il ne peut rien nous arriver de désagréable.

Le capataz salua son maître et fut au galop se replacer à la tête de la caravane.

Une heure plus tard, sans autre accident, la caravane atteignit le Rancho.

Don Sylva se tenait à la portière droite du palanquin, parlant à sa fille qui ne lui répondait que par monosyllabes, malgré les efforts continuels qu’elle faisait pour cacher sa tristesse aux yeux clairvoyants de son père, lorsque l’haciendero s’entendit appeler à plusieurs reprises : il détourna vivement la tête et poussa une exclamation de surprise en reconnaissant le comte de Lhorailles dans l’homme qui l’interpellait ainsi.

— Comment ! señor conde, vous ici ! s’écria— t-il ; par quel singulier hasard vous rencontrai-je si près du port, vous qui deviez avoir pris cette nuit une si grande avance sur moi ?

En apercevant le comte, la jeune fille s’était sen-