Page:Aimard - La Grande flibuste, 1862.djvu/143

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Ces deux cavaliers étaient don Luis et Belhumeur.

Ils entravèrent leurs chevaux auprès de celui du chef, s’étendirent devant le feu, et, sur l’invitation muette de l’Indien, ils attaquèrent vigoureusement le souper préparé en leur faveur.

La veille, les deux hommes étaient partis du Rancho et avaient voyagé sans perdre un instant pour rejoindre le chef.

Le comte de Lhorailles leur avait offert, dans la pulqueria, de voyager avec eux ; mais Belhumeur avait décliné cette offre. Ignorant pour quelle cause le chef indien lui avait donné rendez-vous, il ne se souciait pas de mêler un étranger dans les affaires de son ami.

Pourtant les trois hommes s’étaient séparés dans d’excellents termes, et le comte avait fortement engagé don Luis et le Canadien à lui faire visite à Guetzalli, offre à laquelle ils avaient répondu évasivement.

Singulier effet de la sympathie : l’effet produit par le comte sur les deux aventuriers lui avait été si défavorable que ceux-ci, bien qu’en lui répondant avec la plus grande politesse, n’avaient pas jugé convenable de se faire connaître et avaient usé de la plus grande retenue à son égard, poussant la prudence jusqu’à lui laisser ignorer leur nationalité, en continuant à causer avec lui en espagnol, bien qu’au premier mot qu’il avait prononcé, ils l’eussent reconnu pour Français.

Lorsqu’ils eurent terminé leur repas, Belhumeur bourra sa pipe et avança la main vers le brasier pour prendre un charbon.