Page:Aimard - La Grande flibuste, 1862.djvu/212

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Cependant l’obscurité s’épaississait rapidement autour d’eux : les objets éloignés commençaient à se confondre avec les masses d’ombre de l’horizon, et bientôt ils se trouvèrent au milieu de complètes ténèbres.

Depuis quelque temps déjà le lepero cherchait soit en toussant, soit en poussant des exclamations, à attirer sans pouvoir y parvenir l’attention de son compagnon ; mais lorsqu’il reconnut que la nuit était complètement devenue noire, que le Tigrero ne semblait pas s’en occuper et continuait à marcher toujours, il s’enhardit enfin à lui adresser la parole :

— Don Martial ? dit-il.

— Hein ? répondit insoucieusement celui-ci.

— Ne trouvez-vous pas qu’il serait temps de vous arrêter un peu ?

— Pour quoi faire ?

— Comment ! pour quoi faire ? répondit le lepero avec un bond d’étonnement.

— Oui, nous ne sommes pas arrivés encore.

— Nous allons donc quelque part ?

— Pourquoi aurions-nous quitté nos amis, sans cela ?

— C’est juste. Mais où allons-nous ? voilà ce que je voudrais savoir,

— Bientôt vous le saurez.

— Je vous avoue que cela me fera plaisir.

Il y eut un silence, pendant lequel ils continuèrent à avancer.

Ils avaient laissé à deux portées de fusil environ derrière eux la colline de Guetzalli et avaient atteint une espèce de crique qui, à cause des sinuosités du