Page:Aimard - La Grande flibuste, 1862.djvu/286

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Le comte réprima avec peine un geste d’impatience.

— Procédez alors comme bon vous semblera, dit-il.

— Bon ! de cette façon, nous ne tarderons pas à nous entendre.

— J’écoute.

— M’y voilà, señor. Vous êtes étranger dans ce pays ; arrivé depuis quelques mois à peine, vous n’en connaissez encore ni le caractère des habitants, ni les mœurs, ni les usages. Fort des connaissances acquises par vous dans votre patrie, vous avez cru, en arrivant parmi nous, que tout se ferait au gré de vos désirs, parce que, pensiez-vous, votre intelligence est bien supérieure à la nôtre : vous avez agi en conséquence.

— Au fait, señor, au fait, interrompit le comte violemment.

— J’y arrive, monsieur ; vous vous êtes, grâce à des protecteurs puissants, trouvé de prime abord placé dans une situation exceptionnelle. Vous avez fondé une magnifique colonie dans la plus riche province du Mexique, sur la frontière du désert ; vous avez demandé alors et obtenu du gouvernement le grade de capitaine avec le droit de lever une compagnie franche composée seulement de vos compatriotes, spécialement destinée à faire la chasse aux Apaches, Comanches, etc. ; cela se comprend, nous sommes si poltrons, nous autres Mexicains !

— Señor, señor, je vous ferai observer que tout ce que vous me dites là est au moins inutile, s’écria le comte avec colère.

— Pas autant que vous le supposez, reprit l’autre toujours impassible ; mais, tranquillisez-vous, j’ai