fortunes sont si grandes ; de plus, doña Anita, sa fille, est charmante ; bref, vous vous êtes introduit chez don Sylva ; vous lui avez demandé la main de sa fille, et il vous l’a accordée ; le mariage devrait même à présent être fait depuis déjà un mois. Veuillez maintenant, caballero, redoubler d’attention, car j’entre dans la partie la plus intéressante de mon récit.
— Continuez, señor, vous voyez que je mets à vous écouter toute la patience désirable.
— Vous serez récompensé de cette complaisance, caballero, soyez tranquille, fit l’inconnu avec une nuance de raillerie insaisissable.
— J’ai hâte que vous terminiez, señor.
— M’y voici : malheureusement pour vos projets, caballero, doña Anita n’avait pas été consultée par son père sur le choix d’un époux ; depuis longtemps déjà, elle aimait en secret un jeune homme qui lui avait, dans une certaine circonstance, rendu un important service.
— Le nom de cet homme, vous le savez, n’est-ce pas ?
— Oui, señor.
— Dites-le moi.
— Pas encore ; cet homme l’aimait aussi. Les deux jeunes gens se virent à l’insu de don Sylva et se jurèrent un amour éternel. Lorsque doña Anita fut, par l’ordre de son père, contrainte de vous considérer comme son fiancé, elle feignit de se soumettre, car elle n’osait résister en face à son père ; mais elle avertit celui qu’elle aimait, et tous deux, après avoir renouvelé leurs serments d’amour, avisèrent au moyen de rompre ce fatal mariage.