Page:Aimard - La Grande flibuste, 1862.djvu/320

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de terreur. Je vous le répète, nous sommes seuls ici, bien seuls ; c’est donc à moi que s’adresse ce signal. Et, tenez, le voilà qui recommence.

— C’est vrai, fit-elle, je le vois.

— Il faut que je sache ce que cela veut dire ! s’écria-t-il en saisissant son rifle.

— Oh ! don Martial, je vous en supplie, prenez garde ! soyez prudent. Songez à moi, ajouta-t-elle avec angoisse.

— Rassurez-vous, doña Anita, je suis un trop vieux coureur des bois pour me laisser tromper par une ruse grossière. À bientôt.

Et sans écouter davantage la jeune fille, qui cherchait encore par ses prières et ses larmes à le retenir, il s’élança sur la pente de la colline qu’il descendit rapidement, bien qu’avec la plus grande prudence.

Arrivé dans la prairie, le Tigrero s’arrêta un instant afin de s’orienter.

La caravane était campée à deux portées de flèche du Gila, presque en face d’une grande île qui n’est, en réalité, qu’un rocher affectant à peu près la forme humaine, et que les Apaches nomment le maître de la vie de l’homme.

Dans leurs excursions sur le territoire mexicain, les Peaux-Rouges ne manquent jamais de s’arrêter sur cette île pour y déposer des offrandes, cérémonie qui consiste à jeter dans l’eau, en dansant, du tabac, des cheveux et des plumes d’oiseau.

Ce rocher, qui offre de loin l’aspect le plus curieux et le plus saisissant, est percé de deux excavations qui ont chacune plus de douze cents pas de long sur quarante de large, et dont le sommet est en forme d’arche.