Page:Aimard - La Grande flibuste, 1862.djvu/341

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— Mes amis, il est impossible que nous causions plus longtemps ainsi ; je ne puis rien comprendre à ce que vous dites. Chargez un de vos camarades de me faire, en votre nom, vos réclamations ; si elles sont justes, j’y ferai droit ; soyez tranquilles.

Après avoir prononcé ces paroles, le comte appuya l’épaule contre la porte de la maison, se croisa les bras sur la poitrine, et se remit à fumer paisiblement, indifférent en apparence à ce qui se passait autour de lui.

Le sang-froid et la fermeté déployés par Monsieur de Lhorailles depuis le commencement de cette scène avaient déjà porté leurs fruits ; il avait reconquis de nombreux partisans parmi ses soldats ; ces hommes, bien qu’ils n’osassent pas encore avouer hautement la sympathie qu’ils éprouvaient pour leur chef, appuyèrent chaudement la proposition qu’il leur avait faite.

— Le capitaine a raison, dirent-ils ; il est impossible, si nous continuons à lui corner tous à la fois un tas de sottises aux oreilles, qu’il comprenne nos raisons.

— Il faut être juste aussi, reprirent d’autres, comment voulez-vous que le capitaine nous fasse justice, si nous ne lui expliquons pas clairement ce que nous voulons.

L’émeute avait fait un pas rétrograde immense ; elle ne parlait plus déjà de déposer ses chefs, elle se bornait à demander justice à son capitaine ; donc, tacitement, elle le reconnaissait toujours.

Enfin, après des pourparlers sans nombre entre les mutins, un d’entre eux fut désigné pour prendre la parole au nom de tous.