— Oui, murmura le Tigrero, et elle le restera jusqu’à ce que le temporal se déchaîne.
— Alors, reprit doña Anita, que Dieu nous vienne en aide !
— Amen ! s’écrièrent en se signant tous les voyageurs, répondant instinctivement à cette voix secrète que chacun a au fond du cœur et qui leur prédisait un malheur.
Quelques heures s’écoulèrent.
Le temps restait beau : parfois, à une grande hauteur au-dessus de leur tête, les voyageurs voyaient passer des volées innombrables d’oiseaux qui se dirigeaient vers les régions chaudes ou las tierras calientes, ainsi que l’on dit dans le pays, et se hâtaient de traverser le désert.
Mais, partout et toujours, on ne voyait qu’un sable gris et terne ou de sombres rochers bizarrement entassés les uns au-dessus des autres, comme ces ruines sans nom d’un monde inconnu et antédiluvien que parfois on rencontre dans les hautes solitudes.
La caravane, lorsque venait le soir, campait à l’abri d’un bloc de granit, allumant un maigre feu, suffisant à peine pour se garantir du froid glacial qui, dans ces régions, pèse la nuit sur la nature.
Don Martial voltigeait sans cesse sur les flancs de la petite troupe, tantôt à droite, tantôt à gauche, en avant, en arrière, veillant sur sa sûreté avec une sollicitude filiale ; ne demeurant jamais un instant en repos, malgré les instances de don Sylva et les prières de la jeune fille.
— Non ! répondait-il toujours ; de ma vigilance dépend votre sécurité. Laissez-moi agir à ma guise ;