Page:Aimard - La Grande flibuste, 1862.djvu/40

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avec une certaine sécheresse qui rendait toute conversation impossible.

Le comte feignit de ne pas remarquer cette nuance ; il s’inclina en souriant, et se laissant tomber sur une butacca :

— J’attendrai, dit-il nonchalamment. Rien ne me presse.

L’haciendero, en disant à sa fille que le mari qu’il lui destinait était un beau cavalier, ne l’avait nullement flatté. Le comte Maxime Gaétan de Lhorailles était un homme de trente ans au plus, d’une taille svelte, dégagée, un peu au-dessus de la moyenne. Ses cheveux blonds le faisaient reconnaître pour un fils du Nord ; ses traits étaient beaux, son regard expressif, ses mains et ses pieds dénotaient la race ; tout en lui sentait le gentilhomme de bonne souche, et si don Sylva ne s’était pas plus trompé au moral qu’il ne l’avait fait au physique, le comte de Lhorailles était réellement un cavalier accompli.

Enfin l’haciendero épuisa tout l’or que Cucharès lui avait apporté ; il fit à son tour voler la table dans la rue, ordonna de refermer les fenêtres, et vint en se frottant les mains s’asseoir auprès du comte.

— Là ! dit-il d’un air joyeux, voilà qui est fait ; maintenant je suis tout à vous.

— D’abord un mot.

— Dites.

— Excusez-moi ; vous savez que je suis étranger, et comme tel avide de m’instruire.

— Je vous écoute.

— Depuis que j’habite le Mexique, j’ai vu quantité de coutumes extraordinaires ; je devrais être blasé sur l’imprévu ; cependant je vous avoue que