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Page:Aimard - La Grande flibuste, 1862.djvu/412

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quelle contenance tenir, son émotion était visible aux yeux de tous.

— Qu’avez-vous à répondre ? lui demanda le capitaine.

Dans les circonstances comme celle qui se présentait, l’homme attaqué n’a que deux moyens de se défendre : feindre l’indignation ou le mépris.

Cucharès choisit le mépris.

Rappelant toute son audace et son effronterie, il assura sa voix, haussa les épaules avec dédain et répondit d’une voix ironique :

— Je ne ferai pas au señor don Blas l’honneur de discuter ses paroles ; il y a certaines accusations qu’un honnête homme ne discute pas. J’ai dû me conformer aux ordres du capitaine, qui seul commande ici ; depuis que nous sommes dans le désert, nous avons perdu près de vingt hommes tués par les Indiens ou par la maladie ; peut-on logiquement me rendre responsable de ce malheur ? Ne suis-je pas comme vous tous exposé à périr dans le désert ? Est-il en mon pouvoir d’échapper au sort qui vous menacé ? Si le capitaine m’avait ordonné de traverser seulement le del Norte, depuis longtemps déjà nous en serions sortis ; il m’a dit qu’il voulait atteindre les Apaches, j’ai dû me conformer à sa volonté.

Ces raisons, toutes spécieuses qu’elles étaient, furent cependant acceptées pour bonnes par les officiers ; Cucharès respira ; mais il n’en avait pas fini encore avec le capataz.

— Bien, dit celui-ci ; à la rigueur, peut-être auriez-vous droit de parler ainsi, et ajouterais-je foi à