vaincre l’ennemi implacable contre lequel ils luttaient, le désert !
De deux cent quarante-cinq hommes dont se composait la compagnie à son entrée dans le del Norte, cent trente-trois survivaient encore, en admettant que ces spectres hâves et décharnés fussent des hommes.
La douleur la plus atroce que puisse souffrir un homme dans le désert, c’est l’affreuse maladie nommée calentura par les Mexicains.
La calentura !
Cette folie temporaire qui vous fait voir, pendant ses accès intermittents, les mets les plus délicats et les plus délicieux, les eaux les plus limpides, les vins les plus choisis, qui vous rassasie, vous énerve, et lorsqu’elle vous quitte vous laisse plus abattu, plus brisé qu’auparavant, car vous conservez le souvenir de tout ce que vous avez possédé en rêve.
Un jour enfin, les malheureux, accablés de misères et de tortures de toutes sortes, refusèrent d’aller plus loin, résolus de mourir où le hasard les avait conduits. Ils se couchèrent sur le sable brûlant, à l’ombre de quelques Ahuehuelts, avec la ferme volonté d’y demeurer immobiles, jusqu’à ce que la mort, que depuis si longtemps ils appelaient à grands cris, vint enfin les délivrer de leurs maux.
Le soleil se coucha dans un nuage de pourpre et d’or, au bruit des malédictions et des imprécations de ces misérables, qui, n’attendant plus rien, n’espérant plus rien, n’avaient plus conservé que l’instinct cruel de la bête féroce.
Cependant la nuit succéda au jour, peu à peu le calme remplaça le désordre. Le sommeil, ce grand