Page:Aimard - La Loi de Lynch, 1859.djvu/370

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À peine avaient-ils fait ainsi trois cents pas, qu’une clameur effroyable s’éleva derrière eux ; une grande lueur éclaira la forêt, et à travers les feuilles les fugitifs aperçurent les silhouettes noires des Indiens qui couraient dans tous les sens, gesticulant et hurlant avec fureur.

— Eh ! fit le Cèdre-Rouge, il paraît que les Comanches se sont aperçus que vous les avez abandonnés.

— Cela me fait cet effet-là, répondit Nathan en ricanant. Pauvres gens ! ils ne peuvent se consoler de ma perte.

— D’autant plus que probablement vous ne les avez pas quittés sans laisser des traces de votre passage.

— Comme vous dites, père, fit l’autre en soulevant sa blouse de chasse et montrant deux chevelures sanglantes pendues à sa ceinture ; je me suis livré à mon petit commerce, il ne faut pas négliger les affaires.

Le misérable, avant que de s’attacher au lasso, avait, avec un horrible sang-froid, scalpé ses deux victimes.

— Ah ! bien ; alors, dit Fray Ambrosio, ils doivent être furieux ; vous savez que les Comanches ne pardonnent pas. Comment avez-vous pu commettre une action aussi indigne ?

— Mêlez-vous de ce qui vous regarde, señor padre, dit brutalement Nathan, et laissez-moi agir à ma guise, si vous ne voulez pas que d’un coup de crosse je vous envoie prendre ma place.

Le moine se mordit les lèvres.

— Bête brute ! murmura-t-il.

— Allons, la paix, au nom du diable ! dit le Cèdre-Rouge ; songeons à ne pas nous laisser prendre.