XXII.
La Rencontre.
— Pardieu ! disait le général Ibañez, il faut avouer que ces diables rouges nous ont rendu, sans s’en douter, un immense service ; on aurait dit, le diable m’emporte ! qu’ils agissaient avec connaissance de cause. Cet Unicorne, ainsi que se nomme leur chef, est un homme précieux en certaines circonstances ; je tiens à cultiver sa connaissance, on ne sait pas ce qui peut arriver ; il est souvent bon d’avoir pour ami un gaillard aussi intelligent que celui-là.
— Vous plaisantez toujours, général, quand donc serez-vous sérieux une bonne fois ? répondit en souriant don Miguel.
— Mon ami, que voulez-vous, nous jouons en ce moment notre tête dans une partie désespérée, gardons pour nous au moins la gaieté ; si nous sommes vaincus, il sera temps d’être triste et de faire d’amères réflexions sur l’instabilité des choses humaines.
— Oui, votre philosophie ne manque pas d’une certaine pointe de fatalisme, qui la relève à mes yeux ; je suis heureux de vous voir dans ces bonnes dispositions, surtout au moment où nous nous préparons à jouer notre dernière partie.
— Tout n’est pas désespéré encore, et j’ai un secret pressentiment que tout, au contraire, est pour le mieux ; notre ami le chercheur de pistes est, j’en suis convaincu, pour quelque chose, sinon pour tout, dans ce qui nous arrive.
— Le croyez-vous ? demanda vivement don Miguel.