Page:Aimard - Le Chercheur de pistes, 1860.djvu/331

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désordres causés par la lutte précédente ; puis, lorsque tout fut en place, il jeta un regard autour de lui.

Le moine, les coudes sur la table et la cigarette à la bouche, buvait à petits coups la liqueur restée dans la bouteille, sans doute pour se consoler de la navajada dont l’avait gratifié don Pablo.

— Eh ! dit le ranchero d’une voix insinuante, señor padre, savez-vous qu’il est à peine cinq heures ?

— Vous croyez ? répondit l’autre, pour dire quelque chose.

— J’en suis sûr.

— Ah !

— Est-ce que le temps ne vous semble pas long ?

— Extraordinairement.

— Si vous le vouliez, il nous serait facile de l’abréger.

— De quelle façon ?

— Oh ! mon Dieu ! avec ceci.

Et Andrès sortit de ses bottes un jeu de cartes crasseux, qu’il étala avec complaisance sur la table.

— Ah ! la bonne idée ! s’écria le moine, dont les yeux étincelèrent ; faisons un monté.

— À vos ordres !

— Don Andrès, vous êtes un homme charmant. Que jouerons-nous ?

— Ah ! diable ! c’est vrai, il faut jouer quelque chose, fit le ranchero en se grattant la tête.

— La moindre des choses, simplement pour intéresser la partie.

— Hum ! encore faut-il l’avoir.

— Que cela ne vous embarrasse pas ; si vous y consentez, je vous ferai une proposition.

— Faites, señor ; vous êtes un homme éminemment