Page:Aimard - Le Chercheur de pistes, 1860.djvu/80

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adressant des menaces, je ne songe pas non plus à capter votre confiance par des révélations que vous avez le droit de supposer surprises par hasard.

L’hacendero considéra avec étonnement son singulier interlocuteur dont le ton et les manières avaient si subitement changé.

— Je ne vous comprends pas, lui dit-il ; expliquez-vous plus clairement, car les paroles que vous venez de prononcer sont une énigme dont je cherche vainement le mot.

— Vous allez être satisfait, caballero, et si cette fois vous ne comprenez pas le sens de mes paroles, c’est, ma foi, que vous y mettrez de la mauvaise volonté. De même que tous les hommes intelligents, vous êtes fatigué des luttes incessantes dans lesquelles s’usent, sans profit, toutes les forces vitales de votre pays ; vous avez compris qu’une terre aussi riche, aussi fertile, en un mot aussi puissamment douée que le Mexique, ne pouvait pas, ne devait pas, dirai-je plutôt, rester plus longtemps l’enjeu d’ambitions mesquines et l’arène où toutes les tyrannies de passage prennent tour à tour leurs ébats. Depuis bientôt trente ans, vous avez rêvé l’émancipation, non pas de votre patrie tout entière, tâche trop forte pour votre bras et dont le succès est irréalisable, mais vous vous êtes dit : Enfant du Nouveau-Mexique, rendons-le indépendant ; formons-en un État libre, régi par de sages lois rigoureusement exécutées ; par des institutions libérales, donnons l’essor à toutes les richesses dont il regorge, rendons à l’intelligence toute la liberté qui lui est nécessaire, et peut-être, dans quelques années, la Confédération entière du Mexique, émerveillée par les magnifiques résultats que j’obtiendrai, suivra-t-elle