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Les conjurés étaient demeurés froids et impassibles.

Dès que l’espion fut mort, sur un signe de leur chef, plusieurs hommes ouvrirent une trappe qui se trouvait dans le plancher.

Sous cette trappe était un trou à moitié rempli de chaux vive.

Le cadavre jeté dedans, la trappe fut refermée.

— Justice est faite, mes frères, dit don Tadeo d’une voix brève, allez en paix, le Roi des ténèbres veille sur vous.

Les conjurés s’inclinèrent respectueusement, et disparurent les uns après les autres sans prononcer une parole.

Au bout de dix minutes la salle était vide, il n’y restait plus que deux personnes, don Tadeo et don Gregorio.

— Oh ! fit don Tadeo, nous heurterons-nous donc continuellement à des traîtres ?

— Courage ! ami, vous l’avez dit vous-même, dans quelques heures commencera la guerre au soleil.

— Dieu veuille que je ne me sois pas trompé ! cette lutte dans l’ombre a des exigences affreuses, je sens que le cœur me manque.

Les deux conspirateurs regagnèrent la chingana dans laquelle on dansait et on riait toujours, ils la traversèrent à pas lents et sortirent dans la rue.

À peine avaient-ils fait quelques pas qu’un homme se présenta à eux.

Cet homme était Valentin Guillois.

— Dieu soit loué, qui vous amène si à point ! s’écria don Tadeo.

— J’espère que je suis exact, dit en riant le Parisien.

Don Tadeo lui serra la main et l’entraîna vers son logis, où nos trois personnages ne tardèrent pas à arriver.



XXVIII

LE TRAITÉ DE PAIX


Le général Bustamente était venu à Valdivia sous le prétexte de renouveler lui-même les traités qui existaient entre la République du Chili et la Confédération auracanienne.

Ce prétexte était excellent en ce sens qu’il lui permettait de concentrer des forces considérables dans la province, et qu’il lui donnait en outre une raison plausible de recevoir les Ulmènes les plus influents parmi les Indiens, qui ne manqueraient pas d’assister à la cérémonie, accompagnés d’un grand nombre de mosotones.

Chaque fois qu’un nouveau président est élu au Chili, le ministre de la Guerre renouvelle en son nom les traités. Le général Bustamente avait jusqu’à ce moment négligé de le faire ; il avait de bonnes raisons pour cela.

Cette cérémonie, dans laquelle on déploie exprès un grand appareil, a lieu