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— Dans quel toldo se trouve-t-elle ? lui demanda-t-il.

— Venez, répondit laconiquement l’Indien.

Antinahuel le suivit.

Ils firent quelques pas sans échanger une parole.

Le chef pressait avec force sa main sur sa poitrine comme pour comprimer les mouvements de son cœur.

Après dix minutes d’une marche précipitée, les deux hommes se trouvèrent devant une cabane isolée, à l’intérieur de laquelle on voyait briller une faible lueur.

L’Indien s’arrêta, et se tournant vers Antinahuel :

— C’est là, dit-il en étendant le bras dans la direction de la cabane.

Le toqui se retourna pour s’assurer que ses mosotones, que dans la rapidité de sa course il avait laissés bien loin derrière lui, le rejoignaient ; puis, après une seconde d’hésitation, il s’approcha de la porte et la poussa en disant d’une voix basse, mais résolue :

— Il faut en finir !

La porte s’ouvrit, il entra.




XLIII

DEUX HAINES


Antinahuel se trouva face à face avec doña Maria.

Par un mouvement instinctif, chacun fit un pas en arrière en étouffant un cri.

Cri de stupeur de la part d’Antinahuel, de surprise de la part de la Linda.

— Oh ! soupira avec accablement doña Rosario, en courbant la tête sous le regard ardent du chef indien ; oh ! Seigneur ! c’est à présent que je suis bien réellement perdue !

Doña Maria avait en quelques secondes refoulé au fond de son cœur les sentiments qui bouillonnaient en elle.

Ce fut d’une voix douce, avec un visage riant, qu’elle adressa la parole à Antinahuel.

— Mon frère est le bienvenu, dit-elle, en l’invitant à entrer dans le cuarto, à quel heureux hasard dois-je sa présence ?

— Hasard heureux, pour moi surtout, répondit-il avec un sourire railleur, en composant son visage.

Le toqui connaissait trop bien son amie d’enfance pour ne pas savoir qu’il avait en elle un rude adversaire, avec lequel il lui faudrait jouer serré pour l’amener à faire ses volontés.

— Eh bien ! reprit la Linda, mon frère daignera-i-il-me faire le plaisir de