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LES FRANCS TIREURS

qui dura à peine quelques secondes, il s’étendit sur le sol et commença à ramper doucement au milieu des herbes sans produire le plus léger froissement.

Nous reviendrons maintenant au moine que nous avons laissé se dirigeant vers le campement des chasseurs en compagnie du Renard-Bleu.

Le chef apache, après lui avoir fait les recommandations qu’il supposait les plus propres à lui inspirer une salutaire terreur et le contraindre à servir ses projets, l’avait laissé seul et avait disparu si subitement, que le moine ne put deviner de quel côté il avait passé.

Dès qu’il fut seul, fray Antonio jeta un regard craintif autour de lui ; son esprit était perplexe, il ne se dissimulait pas combien la mission dont le chef l’avait malgré lui chargé était délicate et difficile à accomplir, surtout auprès d’un homme aussi fin et aussi au courant des ruses indiennes que le tueur de tigres.

Une fois de plus le moine maudit la malignité de son étoile qui le conduisait dans de pareils traquenards et semblait prendre plaisir à accumuler sur sa tête toutes les contrariétés et toutes les tribulations possibles.

Un instant, il songea à fuir, mais il réfléchit que sans doute il était soigneusement surveillé, et qu’au moindre mouvement suspect qu’il essaierait, les invisibles gardiens qui le guettaient apparaîtraient subitement devant lui et le contraindraient à tenter l’aventure jusqu’au bout.

Heureusement pour lui, le moine appartenait à cette classe privilégiée d’hommes, sur lesquels les plus grands chagrins n’ont pour ainsi dire pas de