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LES FRANCS TIREURS

— Suis-je une vieille femme qu’on trompe avec les paroles doucereuses d’une langue fourchue ? dit-il. Le Renard Bleu est mort, mes yeux ne voient ici qu’un sachem apache, c’est-à-dire un ennemi.

— Que mon frère ôte la peau de son cœur, il reconnaîtra son ami, répondit l’Indien toujours mielleux.

Tranquille sentait malgré lui l’impatience le gagner devant une aussi cynique impudence.

— Trêve de beaux discours à la sincérité desquels je ne crois pas, dit-il. Était-il mon ami, celui qui, il y a quelques jours à peine, a voulu s’emparer de ma fille et à la tête de je ne sais combien de guerriers a attaqué le calli qui lui servait de demeure et qui maintenant est réduit en cendres ?

— Mon frère a entendu le moqueur bourdonner à son oreille, et il a ajouté foi à ses mensonges ; le moqueur est un oiseau bavard et menteur.

— Plus menteur et plus bavard vous êtes que le moqueur, s’écria Tranquille en frappant avec violence la crosse de son rifle sur le soi. Pour la dernière fois, je vous répète que je vous considère, non pas comme un ami, mais comme un ennemi ; maintenant nous n’avons plus rien à nous dire, séparons-nous, car cette conférence oiseuse n’a déjà duré que trop longtemps.

L’Indien jeta un regard perçant autour de lui, son œil lança un éclair sinistre.

— Nous ne nous quitterons pas ainsi, dit-il en faisant deux ou trois pas pour se rapprocher du chasseur toujours immobile.

Celui-ci suivait attentivement chacun de ses mou-